Immobilier et construction : pourra-t-on tourner la page des assureurs défaillants ?

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Immobilier et construction : pourra-t-on tourner la page des assureurs défaillants ?

Immobilier et construction : pourra-t-on tourner la page des assureurs défaillants ? 

Entre 2016 et 2018, plusieurs assureurs étrangers ont disparu du marché français. Leur liquidation a mis en danger de nombreux acteurs de l’immobilier qui avait souscrit des contrats auprès d’eux. Deux ans après la crise, où en est-on ? 

Les sentences de liquidation d’assureurs européens se sont égrenés dans les journaux, entre 2016 et 2018 : Gable Insurance basé au Liechtenstein, Alpha Insurance au Danemark, Qudos, également au Danemark… Autant de sociétés qui proposaient des contrats en France, grâce au mécanisme européen de la libre prestation de service (LPS). Cette dernière permet à un assureur agréé dans un pays de l’Union européenne de proposer des contrats au sein des autres pays membres. Et ce, sans avoir à obtenir l’agrément des autorités locales. 

De nombreux acteurs européens peu qualifiés avaient ainsi profité de ce mécanisme pour vendre des contrats à bas coûts en France. Notamment aux acteurs de l’immobilier, comme les syndics, les gérants d’immeuble ou encore certains constructeurs. Or, sans grande expertise de l’assurance et de l’immobilier, ces assureurs “low-cost” se sont reposés sur des prestataires de service peu fiables pour gérer leurs contrats et leurs fonds notamment, ce qui a conduit à leur faillite successive. 

Leurs liquidations en cascade ont laissé un goût amer aux professionnels de l’immobilier. Très nombreux étaient ceux qui s’étaient laissés séduire par les offres à bas coût : “une prime d'assurance chez eux valait moins de 2 000 euros contre 5 000 euros chez des Français”, se souvient Philippe Raim, du syndic Artemio au magazine Les Echos. Pas étonnant, dès lors, que près de 100 000 contrats du secteur de l’immobilier aient été souscrits auprès de ces acteurs en LPS, d’après les données citées par l’Argus de l’Assurance. Au total, fin 2018, il y avait donc plus de 100 000 contrats en déshérence. 

Vent de panique chez les professionnels de l’immobilier 

Conséquence : de nombreuses structures se sont retrouvées sans couverture, notamment pour la garantie dommages-ouvrage. Syndics et gérants d’immeuble ont ainsi été contraints de payer de leurs poches les réparations de certains sinistres dus à des travaux d’envergure dans leurs immeubles.  

Mais, la situation est encore plus grave pour certains professionnels du bâtiment. Les constructeurs, par exemple, sont obligés de souscrire une garantie décennale. Cette police d’assurance couvre les dommages liés aux défauts de construction des nouveaux immeubles, jusqu’à 10 ans après l’achèvement des travaux. Face à la faillite de leur assureur, de nombreux constructeurs ont donc dû trouver une nouvelle assurance. Ces nouveaux assureurs doivent alors prendre en charge des constructions déjà entamées avec de nombreuses inconnues quant à la bonne tenue des travaux dans le passé. Résultat : les constructeurs et promoteurs ont, soit payé des surcoûts afin de couvrir les risques passés, soit accepté d’avoir un “trou” dans leur couverture. En somme, plusieurs mois voire années de construction passées se retrouvent aujourd’hui sans aucune garantie. Et le risque est immense pour les constructeurs : en cas de dommage dû à une malfaçon pendant cette période, ils devront payer les indemnisations sur leurs fonds propres.  

Des premières solutions mises en place 

Pour faire face à cette situation sans précédent, plusieurs initiatives ont vu le jour. Par exemple, le Fonds de garantie – un organisme regroupant les assureurs français pour prendre en charge certains dommages non couverts – a vu ses capacités d’indemnisation étendues. Jusqu’à la mi-2018, il couvrait les dommages en cas de liquidation d’un assureur français. Depuis le 1er juillet 2018, il prend aussi en compte les liquidations d’assureurs étrangers. Malheureusement, cela ne s’applique que pour les contrats signés après cette date. Ce qui laisse d’innombrables professionnels du bâtiment sur le carreau. 

Des conséquences sur le long terme 

Une situation qui fait craindre le pire pour certains spécialistes. En effet, la plupart des dommages surviennent entre trois et sept ans après la fin des travaux, selon la Fédération française de l’assurance. Le risque serait donc que, d’ici 2025, des constructeurs doivent débourser des sommes importantes face à des dommages non couverts, dus à des malfaçons réalisées des années auparavant. Quitte à mettre en péril leur activité. Les années à venir seront donc déterminantes : entre la crise actuelle du coronavirus qui ralentit la construction et la bombe à retardement des assureurs défaillants, les risques de faillites dans le secteur du bâtiment sont immenses. 

Cependant, la crise des assureurs défaillants aura permis de dresser des leçons qui se font déjà ressentir sur le marché de l’immobilier. “Les entreprises du bâtiment sont mieux informées et prennent des précautions avant de souscrire”, indique Bernard Delas, vice président de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), l’organisme de régulation des banques et des assurances. Peu à peu, les acteurs de la construction et de l’immobilier ont compris qu’il était primordial de souscrire leurs contrats auprès d’assureurs français solides et bien implantés. 

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