Déconfinement : le marché de l’immobilier connaîtra-t-il la crise ?

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Déconfinement : le marché de l’immobilier connaîtra-t-il la crise ?

 

Va-t-on assister à une baisse des prix de l’immobilier ? Le marché risque-t-il de connaître une crise de la demande, après la période de confinement ? Pour les acteurs du secteur, les questions se bousculent. Une chose est certaine : le marché de l’immobilier aura un autre visage après le 11 mai – date du début du déconfinement en France.

Chantiers à l’arrêt, offices de notaire au ralenti pour rattraper le retard accumulé durant le confinement, visites de biens décalées après le 11 mai… les professionnels de l’immobilier vont devoir prendre leur mal en patience : le marché ne semble pas parti pour reprendre avec vigueur, dès la fin du confinement.

D’autant que plusieurs indicateurs inquiètent les spécialistes. Le taux de chômage d’abord, qui a grimpé de 7,1 % en mars dans l’Hexagone. Soit la plus forte hausse depuis 1996 ! Nul doute que le pouvoir d’achat des Françaises et des Français en sera affecté, de même que leur capacité à emprunter. Autre sujet de tension : les taux d’intérêt. Ils sont intimement liés à l’évolution du marché immobilier, puisqu’ils peuvent inciter ou dissuader un achat. Pour le moment, ces taux restent, en moyenne, très bas selon l’Observatoire crédit logement : 1,16 % à la mi-avril, contre 1,14 % en mars. Pourtant, face à la baisse des demandes de prêts (-14 % depuis le confinement), les banques pourraient être amenées à augmenter leurs taux, dissuadant alors nombre de futurs propriétaires. 

La question des prix

Les prix des logements sont eux aussi un sujet d’inquiétude pour les professionnels de l’immobilier. À court terme, beaucoup envisagent une baisse importante. Face aux retards accumulés durant le confinement, certains vendeurs pressés pourraient en effet être amenés à accepter des offres plus faibles. D’autres pourraient aussi diminuer leur prix de vente en constatant la plus faible demande, comme dans certaines grandes villes. 

Malgré ces sujets d’inquiétude, les événements passés peuvent rassurer quelque peu les professionnels de l’immobilier. Lors de l’épidémie de SRAS de 2003 à Hong Kong, les prix de l’immobilier n’avaient reculé que de 1,6 %. De quoi rester optimiste donc !

La demande reste au rendez-vous

Bonne nouvelle pour les professionnels de l’immobilier confinés : les Françaises et les Français ne semblent pas freiner leur projet immobilier du fait de la crise. Selon un sondage de l’institut BVA, entre février et mars 2020, la part de la population qui a un projet d’achat ou de vente n’a diminué que de 2 %. Mieux : selon une étude de SeLoger.com et l’Observatoire du moral immobilier, 7 personnes sur 10 restent confiantes quant à la réalisation de leur projet dans les 6 prochains mois. La demande est donc bien là. 

Recherche maison, loin des villes

Pourtant, cette demande semble évoluer massivement. À la mi-avril 2020, le promoteur Capelli a interrogé les Français. Parmi celles et ceux qui envisagent un achat, 57 % déclarent avoir modifié leurs critères, à l’aune de la pandémie. Une grande partie (17 %) considère ainsi que la proximité avec le lieu de travail n’est plus prépondérante. Télétravail oblige. Une plus grande part encore (36 %) estime désormais primordial de disposer d’un accès extérieur pour son futur logement. En période de confinement, les balcons, terrasses et jardins font fureur. 

Un constat confirmé par un autre chiffre dévoilé par SeLoger.com. Selon le site d’annonces immobilières, les recherches d’appartements à Paris ont, par exemple, diminué de 12 % depuis le confinement. De leur côté, les maisons en dehors des grandes villes sont plébiscitées, avec une hausse de 5 % des consultations. 

Pour autant, la question demeure : sommes-nous face à un changement durable de la demande des futurs acquéreurs, ou une simple passade après la difficile période de confinement ? Pour Christophe Capelli, président du groupe éponyme, “la crise actuelle va certainement modifier en profondeur et durablement les projets immobiliers des Français, avec de nouveaux critères d’achat prenant en compte les difficultés vécues durant cette période.” En somme, nous ne sommes qu’aux prémices d’un changement global. 

Même son de cloche auprès des chercheurs en urbanisme. L’Américain Joel Kotkin augure ainsi déjà d’une “ère de la dispersion”. Selon ce professeur américain d’économie et d’urbanisme, nous assistons ainsi à la fin progressive des “mégacités”, nos immenses agglomérations, toujours plus grandes, toujours plus hautes. Face à la prise de conscience écologique et à la crise sanitaire du coronavirus, ces villes densément peuplées perdent de leur attrait, au profit d’un habitat rural, réputé plus vertueux. L’avenir appartiendrait-il aux campagnes ? Réponse dans quelques années.